Publié dans : Petitjean Luce, Tournier Maurice. Repères pour une histoire des réformes orthographiques. In: Mots, n°28, septembre 1991. Orthographe et société, sous la direction de Nina Catach, Luce Petitjean et Maurice Tournier. pp. 108-112.
www.persee.fr/doc/mots_0243-6450_1991_num_28_1_2040
842 — Serments échangés à Strasbourg entre deux des fils de Charlemagne et leurs troupes, en « langue vulgaire », roman et germanique. Le roman s’écrit avec les caractères latins.
1245 — H.d’Andeli : Bataille des VII ars
(apparition du mot « ortografie »)
1529 — G. Tory : Champfleury
(propositions typographiques ; apparition du mot « orthographe »)
1529 — J. Lefèvre d’Etaples, S. de Colines : Grammatographia
(traité de grammaire et de ponctuation)
1531 — J. Dubois dit Sylvius : Grammatica latinogallica Isagoge (système accentuel très novateur)
1533 — G. Tory (avec la collaboration de C. Marot) : La Briève Doctrine (premier code orthotypographique français, traité d’accentuation et propositions de caractères)
1538 — Création par François 1er de l’Imprimerie du Roy
1540 — E. Dolet : Manière de bien traduire d’une langue en aultre (accents et ponctuation)
1542 — L. Meigret : Traité touchant le commun usage de l’escriture françoise (propositions rapprochant l’orthographe de la prononciation)
1547-1550 — J. Péletier du Mans : Dialogue de l’ortografe et pronon- ciacion françoise (doctrine réformiste de la Pléiade)
1550 — L. Meigret : Tretté de la Grammere Françœze
(doctrine phonétiste)
1550 — Ronsard : Avertissement au lecteur des Quatre premiers livres des Odes (orthographe réformée de la Pléiade)
1557 — R. Estienne : Trakte de la grammaire françoise
(doctrine conservatrice, étymologisante)
1558 — С Marot : édition de ses Oeuvres à Lyon par Jean 1er de Tournes (Premières distinctions i/j et u/v. Dans un poème « à ses disciples » apparaissent les règles de l’accord du participe passé)
1562 — P. de La Ramée dit Ramus : Gramere (reprise des distinctions
i/j et u/v, qui seront appelées « ramistes » ; phonétisme généralisé)
1565 — Ronsard : Abbrégé de l’Art Poétique
1609 — Poisson : Epître au Roi
(contre la « latinortografe » de R. Estienne)
1620 — J. Godard : La Langue françoise (suppression des s muets remplacés par des accent circonflexes, défense du t euphonique, suppression de lettres étymologiques, distinction en/an)
1632 — A. Oudin : « Aduis touchant l’orthographe », in Grammaire françoise (contre les « modernes » et les « nouuelles escritures »)
1635 — Fondation par Louis XIII et Richelieu de l’Académie Française
1635 — Abbé Monet : Invantaire des deus langues françoise et latine (avec une « nouvelle manière d’écriture », contre la « Règle Etymologisante »)
1639 — Ménage : Requeste présentée par les dictionnaires à Messieurs de l’Académie pour la reformation de la langue françoise
1640 — Richelieu crée la « Manufacture royale d’Imprimerie »
1660 — Port-Royal : Grammaire générale et raisonnée
1660-1661 — Somaize : Grand dictionnaire historique des Pretieuses (qui sont pour une « ortographe » simplifiée)
1663 — Corneille : Avis au lecteur (Corneille préconise les lettres « ramistes » et la distinction entre « l’e simple, l’é aigu et l’è grave »)
1668 — Lesclache : Les Véritables régies de l’ortografe francéze (pho- nétisme)
1672 — G. Ménage : Observations sur la langue françoise
1673 — Mezeray : Observations sur l’orthographe de la langue françoise (contre les accents, pour les graphies étymologiques ; exposé de la doctrine choisie par l’Académie)
1680 — Richelet : Dictionnaire françois (avec un système complet d’orthographe simplifiée)
1694 — 1ère édition du Dictionnaire de l’Académie« (plutôt conservatrice, étymologisante ; mais Corneille répandra l’usage des »lettres ramistes« )
1706 — F. Regnier-Desmarais : Traité de grammaire (latiniste)
1709 — Abbé Buffier : Grammaire françoise (moderniste)
1716 — Abbé Girard : L’Ortografe française sans équivoques et dans ses principes naturels
1719 — Jésuites de Trévoux : Plan d’une ortographe suivie pour les imprimeurs (simplifications et usage généralisé des accents)
1733 — P. Simon : Sistême du Bureau tipografique (réforme pédagogique)
1740, 1762 — 3e et 4e éditions du Dictionnaire de l’Académie, dirigée par l’abbé d’Olivet (nombreuses et importantes simplifications orthographiques)
1767 — N. Beauzée : Propositions pour une orthographe « moderne »
1784-1795 — F. U.Domergue : Journal de la Langue française
1798 — 5e édition du Dictionnaire de l’Académie (continuation des simplifications, ajout d’un glossaire de termes « révolutionnaires »)
1805 — Domergue : Lettre à Napoléon demandant « la réforme de notre orthographe »
1811 — C. P.Girault-Duvivier : Grammaire des grammaires (conservatisme jusque dans les erreurs d’étymologie)
1826 — J. J.Marie, académicien : Appel aux français (projet de réforme)
1833 — Décret Guizot instituant l’orthographe comme épreuve du brevet des maîtres
1835 — 6e édition du Dictionnaire de l’Académie (importantes modifications en orthographe grammaticale, adoption des lettres « ramistes », de la graphie « voltairienne » en ai (« avais », au lieu de « avois »), rajout du t dans les pluriels en ant (« enfants » au lieu d’« enfans ») ; mais position conservatrice sur les lettres étymologiques)
1837 — E. Littré propose des régularisations et simplifications.
1867-1868 — A. Firmin-Didot, imprimeur de l’Académie : Observations sur l’Orthographe ou Ortografie française. Propositions pour une réforme orthographique, appuyées par Littré et Sainte-Beuve {Lettre sur l’orthographe, 1867)
1877-1878 — 7e édition du Dictionnaire de l’Académie (introduction de quelques tolérances)
1893 — Rapport O. Gréard à l’Académie. Propositions de simplification, refusées par le « Parti des ducs ».
1889 — Une Pétition de la « Société de réforme » signée par 7000 linguistes est défendue à l’Académie par L. Havet. A partir de cette date, plusieurs revues sont imprimées selon le « sistème ortografique » de L. Clédat.
1891 — L. Bourgeois : circulaire ministérielle contre le « fétichisme de l’orthographe »
1893 — A. Renard : La nouvelle orthographe
1894 — L. Clédat : Gramaire raisonée de la Langue française
1900 — A. Binet : création de la Société libre pour l’étude psychologique de l’enfant (recherches sur la mémorisation, la cacographie, l’épel- lation…)
1900, 1901 — G. Leygues : Arrêtés ministériels (« tolérances » orthographiques, concernant en particulier les accords du participe passé)
1900-1905 — Campagne réformiste, soutenue par À. France.
1905 — F. Brunot : Lettre ouverte à M. le Ministre de l’Instruction publique sur la réforme de l’orthographe ; E. Faguet : Simplification simple de l’orthographe ; P. Meyer : Pour la simplification de notre orthographe. Rapport de la Commission Brunot : sans suite.
1906 — A. Dutens : Etude sur la simplification de l’orthographe
1906 — La Fédération internationale des instituteurs demande une réforme des orthographes (Prise de position identique à l’Internationale des Travailleurs dès 1867). Tous les pays d’Europe s’engagent dans des réformes, sauf la France.
1911 — J. Simon : Le péril de la syntaxe et la crise de l’orthographe (1ère apparition de « crise de l’orthographe » dans un titre)
1924 — T. Simon : Pédagogie expérimentale : écriture, lecture, orthographe
1925 — Lettre de la Société nationale de Linguistique au Ministre de l’Instruction publique pour la « régularisation du français »
1927 — С Beaulieux : Histoire de l’orthographe, des origines au milieu du 16e siècle
1935 — 8e édition du Dictionnaire de l’Académie (traditionaliste)
1939-1940 — A. Dauzat et J. Damourette : propositions de régularisation échelonnées sur une longue durée (dans Le Français moderne)
1945 — E. et O. Bled : 1ère édition des Cours d’orthographe (Règles strictes et listes d’exceptions)
1946-1947 — A. Sève, J. Perrot : ORTHO (manuel de référence des typographes)
1947 — Vœu de la Commission Langevin- Wallon en faveur de réformes
1948 — Projet Peraot-Bruneau (réforme radicale)
1949 — J. Hanse : Dictionnaire des difficultés grammaticales et lexico- logiques
1949 — A. Pirenne : Programme d’orthographe d’usage (pédagogie de R. Buyse)
1952 — Le Conseil supérieur de l’Education nationale vote à l’unanimité en faveur de réformes
1952 — A. Beslais : 1er projet de réforme
1953 — С Beaulieux : Projet de simplification de l’orthographe actuelle et de la langue, par le retour du « bel françois » du 12e siècle
1953 — A. Dauzat : La réforme de l’orthographe. Un projet de conciliation
1960 — L’Académie des Sciences (au 2/3 de ses membres) émet le vœu d’une « réforme prudente de l’orthographe » à réaliser par « les autorités compétentes »
1961-1965 — « Commission d’études orthographiques » (présidée par A. Beslais)
1964 — Echelle Dubois-Buyse d’orthographe usuelle du français (pédagogie)
1965 — A. Beslais : Rapport général sur les modalités d’une simplification éventuelle de l’orthographe française
1963-1966 — Commission ministérielle Rouchette sur l’enseignement du français
1967 — R. Thimonnier : Le système graphique du français (projet de régularisations). Appuis officiels.
1969 — C. Blanche-Benveniste, A. Chervel : L’orthographe (plaidoyer pour une « révolution orthographique »)
1969 — A. Martinet : Le Français sans fard (en 1972 : proposition de YAlfonic)
1970 — Association des Enseignants de Français : Manifeste de Charbonnières
1970-1974 — Commission ministérielle Emmanuel sur l’enseignement du français
1973 — N. Catach : table ronde CNRS sur la structure de l’orthographe française (adoption de 14 principes)
1973 — J. Hanse : rapport au Ministre de l’Education (propositions)
1973-1975 — Une commission de l’Académie (animée par J. Mistier) met au point des « recommandations »
1974 — M.de Maistre : Pour l’orthographe ou contre l’orthographe (introduction de la dysorthographie)
1975 — « Loi relative à l’emploi de la langue française », publiée au Journal officiel le 31 décembre 1975 (règles modérées, lutte contre l’anglicisme)
1976 — trad. fr. de V. Gak (éd. russe : 1952) : L’orthographe (point de vue structural)
1976 — L’Académie accepte certaines des rectifications proposées dans le rapport Hanse
1977 — R. Haby : arrêté ministériel sur les « tolérances grammaticales ou orthographiques » aux examens et aux concours
1983 — N. Catach : création de l’« Association pour l’Information et la Recherche sur les Orthographes et les systèmes d’Ecriture » (AIROE)
1984 — Y. Roudy, ministre des Droits de la femme, crée la Commission de terminologie Groult pour la féminisation des noms de métiers et de fonctions (à l’exemple du Québec)
1986 — L’Académie se rétracte et renonce aux
« rectifications » de 1976
1986 — N. Catach : L’ AIROE lance un Manifeste pour une simplification modérée de l’orthographe française
1988 — L’école libératrice, journal du SNI, publie un sondage effectué auprès des instituteurs : 90 % d’avis favorables à une réforme
1989 — Institution du Conseil supérieur de la langue française et de la Délégation générale à la langue française — Le 1er Ministre, M. Rocard, définit 5 points à réformer
1989 — Appel de linguistes : Moderniser l’écriture du français.
1989 — Lire (B. Pivot) publie un sondage national IPSOS : 44 % d’avis favorables à une réforme et 76 % à la correction des « anomalies »
1989-1990 — Rapport du Conseil supérieur de la langue française, approuvé à l’unanimité par l’Académie (publié au Journal officiel le 6 décembre 1990, sous le titre « Les rectifications de l’orthographe », avec une présentation de M. Druon, secrétaire perpétuel de l’Académie)
1991 — L’Académie renouvelle ses recommandations en ce qui concerne l’ensemble des propositions, en souhaitant qu’il n’y ait pas de circulaire imperative. — La 9e édition de son Dictionnaire procède à une révision graphique en fonction des rectifications en cours.
1991 — N. Catach : Lexique orthographique des mots rectifiés